samedi 15 janvier 2022

Y'a d'la joie dans la bienveillance ! - Chronique sur la Bienveillance - Episode 41

 


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Voici le 41ème épisode de mes chroniques sur la bienveillance inspirées de l'actualité dans le cadre de mon travail de modélisation d'une Société de la Bienveillance.
Cette chronique m'a été inspirée par le livre Le miracle Spinoza de Frédéric Lenoir, et particulièrement par l'extrait suivant :

« Ces sentiments positifs pourront susciter en elle (la personne) un nouveau désir, lequel mobilisera sa volonté pour lui donner la force de suivre sa raison » (page 208 de l'édition de 2019)

Cette citation m'a particulièrement parlé par rapport à mes travaux de modélisation sur la bienveillance et est à l'origine d'un nouveau schéma de ma conception que je présente ci-dessous :






La bienveillance : une question d'éthique, pas de morale

Ce schéma me donne l'occasion de mettre en avant un aspect qui mérite d'être mis en avant : selon ma vision de la bienveillance et l'idée de Société et de Territoires de la Bienveillance, la bienveillance n'est pas vue selon le versant de la morale et de l'obligation ou de l'obéissance, mais selon le versant d'une éthique de la joie telle que Spinoza l'a fondée et dont je me sens proche à maints égards. Autrement dit, je ne veux pas être bienveillant par obligation à une religion mais parce que je suis absolument convaincu que c'est bon pour moi, bon pour autrui, bon pour la planète. C'est à la fois une approche gagnant-gagnant et une question de bon sens et de discernement. Un discernement notamment par la non confusion entre faire plaisir et faire du bien (cf la chronique Attention, plaisir - Le dessous des cartes : tu vas halluciner !).

Vers le bien et la joie ou vers le plaisir

J'ai schématisé la citation de Frédéric Lenoir avec la flèche verte vers le haut, avec un processus de bienveillance qui part de la joie et qui conduit à la joie. Un processus qui tire l'individu vers le haut dans l'approche gagnant-gagnant évoquée précédemment. A l'inverse, j'ai pris le contre-point de la citation, représenté par la flèche rouge vers le bas qui conduit au plaisir éphémère, voire à des émotions négatives quand en réalité le processus amène à un résultat contreproductif. A noter que ce processus qui va vers le bas est celui de la facilité que l'on peut symboliser par un vélo dans une pente descendante : on est en roue libre. Par contre, pour le processus vers le haut, il faut savoir pédaler, pas forcément beaucoup, sachant qu'en réalité quelques fois le principal c'est de donner les premiers coups de pédale. Et c'est la joie qui crée le désir, qui fait l'impulsion.

L'enjeu de permutation affect négatif --> affect positif

Un enjeu important qu'explique Frédéric Lenoir d'après Spinoza est la capacité pour une situation donnée de substituer l'éventuel affect négatif avec lequel on aborde cette situation par un affect positif plus fort que le négatif. En cela, je vois une stratégie salutaire qui se rapproche plus de la psychologie positive que de la pensée positive (Méthode Coué).
Mihaly Csikszentmihalyi, cofondateur de la psychologie positive, est parti de l'idée suivante 

"Le bonheur ne dépend pas de conditions extérieures, mais de la façon dont elles sont interprétées"

pour modéliser l'expérience optimale, appelée aussi flux ("flow" en anglais). Cette citation est à rapprocher de mon schéma : pour une situation donnée (avec ses conditions extérieures), c'est notre façon de l'interpréter et l'émotion dans laquelle nous l'abordons qui nous fera aller :
  • plutôt dans le sens de la facilité, vers une activité centrée sur la recherche du plaisir, et souvent un plaisir en tant que compensation des côtés négatifs de la situation
  • ou plutôt dans le sens de la bienveillance, de la volonté, de la raison, vers une activité de flux.
Alors maintenant, comment passer d'un affect négatif à la joie ? Je vous propose le schéma suivant déjà présenté sur ce blog et ou l'on retrouve aussi deux flèches ascendante et descendante :


Il met en évidence un aspect essentiel à l'origine de tout : notre façon d'observer la situation. Si notre humeur du moment ou nos habitudes nous font l'observer négativement, cela va déclencher une pensée puis une émotion négative. Et c'est là que l'on peut reprendre la main. J'en vois trois possible :

  • enfiler les lunettes roses plutôt que les lunettes noires pour regarder les aspects positifs de la situation, un peu comme si on s'était arrêté aux nuages dans le ciel au loin alors qu'au-dessus de la tête il fait beau et qu'il est possible que les nuages n'arrivent jamais jusqu'à nous
  • se remémorer un souvenir plaisant
  • pour celles et ceux qui pratiquent la PNL, utiliser ses sens et un point d'ancrage en vue d'induire un sensation plaisante
Passer d'un affect négatif à la joie me semble un enjeu du quotidien pour ne pas nous laisser submerger par l'agacement pour des raisons bégnines et polluer notre vie inutilement.

Gare au striatum !

Je fais aussi référence dans ce schéma au livre de Sébastien Bohler "Le bug humain" auquel j'ai consacré l'article L'insoupçonnable et l'insoutenable. Ce livre est consacré au striatum, la partie de notre cerveau la plus primitive qui nous pousse inconsciemment aux plaisirs de la bouffe, de la chair, à l'accumulation de richesses, de choses, à la recherche d'un statut social, à la frénésie de la recherche d'informations et à la facilité. Avec 5 grandes dérives délétères, notamment en matière environnement, que je résume par la phrase "Tout de suite, encore, et encore plus, sans limite et après moi le déluge"


La flèche rouge vers le bas est influencée par ces 5 tendances si puissantes dans notre cerveau et si destructrices pour la planète, pour notre société et pour notre bien-être psychique. Et il nous faut prendre conscience que notre cortex préfrontal siège de la raison nous permet de canaliser le striatum.

L'enseignement énorme et lumineux que l'on peut tirer de Spinoza est qu'il ne faut pas passer en force pour canaliser le striatum par la raison. Il ne faut pas opposer raison et émotion. La raison et le maintien de l'accès à la raison (la volonté, la persévérance) sont portés par les affects positifs, et précisément par la joie, selon Spinoza. Donc, en cela, l'ascétisme et la rationalité pure sont une fausse bonne idée en alternative des comportements irrationnels.

Cercle vertueux Vs cercle vicieux

Aborder une situation dans la joie facilite grandement l'accès à la joie et contribue à un cercle vertueux qui sera d'autant plus puissant qu'il s'appuie sur nos capacités d'appréciation et de gratitude, avec en plus un effet de contagion sur autrui et pour le bien des écosystèmes auxquels nous appartenons.

A l'inverse, les affects négatifs pour faire face à une situation, et en particulier quand elle est difficile, peuvent nous pousser à rechercher des compensations par la recherche de plaisir. Seulement, le plaisir producteur de dopamine n'est pas sans conséquence, et en particulier à une escalade des exigences de plaisir qui finissent par faire tomber dans l'auto-culpabilisation puis un sentiment de vide qui peut conduire à la dépression. Cela construit un cercle vicieux, voire une dégringolade au fond du trou.

La joie, vous dis-je !

La bienveillance ne doit pas être vue par les seules lorgnettes de la responsabilité et de l'exigence, aspects que j'ai évoqués à plusieurs reprises sur ce blog. Si responsabilité et exigence font donc partie indéniablement de la recette (à l'opposé des idées de complaisance et de bisounours véhiculées par des détracteurs de la bienveillance), la joie en fait tout autant partie, dans l'origine, le pendant et la destination. 

Ce qui m'a fait écrire en titre du schéma :
  • La bienveillance naît de la joie : en m'inspirant de Spinoza
  • Y'a de la joie dans la bienveillance : en prenant conscience que si la joie facilite le déclic, la mise en mouvement, il nous faut la conserver dans le cheminement de la bienveillance, et notamment grâce à l'appréciation et la gratitude qui nous mettent la joie en carburant avec un effet contagieux (notamment par les effets de l'expression de la gratitude) et en un cercle vertueux : plus je suis joyeux, plus je suis bienveillant et plus cela me rend ma joie durable
  • Y'a de la joie au bout de la bienveillance : si la joie est la destination, c'est aussi le résultat concret du cheminement.
On retrouve ici l'idée que le bonheur, ce n'est pas (seulement) une quête mais c'est aussi (d'abord) le chemin lui-même.

Article mis à jour le 17/01/2022 en ajoutant dans le schéma un cercle vertueux et un cercle vicieux et la section "Cercle vertueux Vs cercle Vicieux"



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