lundi 3 mai 2021

Changement de posture individuelle - Chronique sur la Bienveillance - Episode 28

 

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Voici le 28ème épisode de mes chroniques sur la bienveillance inspirées de l'actualité dans le cadre de mon travail de modélisation d'une Société de la Bienveillance.

Il m'a été inspiré de l'interview d'Isabelle Desplats co-fondatrice du mouvement Colibris, formatrice en qualité relationnelle coopération et gouvernance partagée, et également psycho-praticienne. Interview publiée dans le cadre du MOOC Transition Intérieure dont j'ai déjà eu l'occasion de parler sur ce blog et que je conseille vivement.


Au début de l'interview, Isabelle Desplats évoque l'idée d'un changement de posture dirigé vers une prise de conscience de l'interdépendance.


Cela m'a inspiré le schéma suivant :





J'avertis en préambule que la posture individualiste que je décris ici se situe très à la gauche d'une échelle de la Bienveillance



La posture individualiste

Il ne s'agit pas de considérer mon schéma comme relevant d'une vision manichéenne. Il s'agit plutôt de partir d'une posture typique (parmi d'autres) cumulant un certain nombre de risques pour la santé de la planète, des écosystèmes et de la santé physique, psychique et sociale. Avec deux grandes caractéristiques :

  • la motivation des actions : centrée uniquement sur la recherche de son propre intérêt, de son plaisir à court terme. Une posture individuelle qui est individualiste, mais qui peut aussi s'observer à l'échelle collective (une organisation qui voit son seul propre intérêt et celui de ses actionnaires) ;
  • l'attribution de la réussite de l'action : la réussite de l'action est attribuée à soi-même uniquement ; le fameux "C'est moi qui l'ai fait !" (sous-entendu "tout·e seul·e"), qui systématisé devient "Je me suis fait tout seul !" et "Je n'ai besoin de personne !" ;
Deux grandes caractéristiques qui s'expriment parfois par des mouvements de bras que vous reconnaîtrez aisément dans l'image animée ci-dessus : à droite "c'est pour moi" et à gauche "c'est grâce à moi !".

Une posture individualiste qui repose sur le principe "la fin justifie les moyens" et autorise le cas échéant à servir son intérêt individuel sur le dos d'autres parties prenantes : autrui, des écosystèmes humains et la planète.

Quels sont les impacts négatifs de ces deux caractéristiques selon moi ?
  • la motivation autocentrée crée possiblement de la malveillance ("la fin justifie les moyens") et de l'absence de bienveillance (inattention à autrui, aux écosystèmes humains, à la planète), avec des comportements qui sont quelques fois paradoxaux : dénonciation d'une société trop sociale tout en utilisant cette société à son profit ;
  • l'auto-attribution de la réussite de l'action déconnecte d'autrui, de la nature, de l'appréciation, de la gratitude et de la joie de vivre.
Une posture qui laisse les manettes au striatum (partie reptilienne de notre cerveau) avec les dérives que je résume de la façon suivante, inspiré par le livre Le bug humain de Sébastien Bohler :



Une telle posture individualiste suffisamment répandue depuis les années 1970 au niveau individuel et collectif, qui crée une destruction foudroyante (à l'échelle de l'histoire de l'humanité) de nous-mêmes, de nos sociétés et de la planète.

Cheminer vers une Société et des Territoires de la Bienveillance

Ma modélisation d'une Société et de Territoires de la Bienveillance est aussi une invitation à un cheminement de postures plus ou moins individualistes, de postures malveillantes, de postures d'absence de bienveillance, vers des postures coopératives ouvertes. Le qualificatif "ouvertes" est important pour différencier avec la coopération fermée qui fait coopération à l'intérieur (et encore faut-il bien regarder s'il ne s'agit pas seulement d'un mot affiché) mais compétition et cloisonnement avec les autres collectifs et communautés à l'extérieur.

Un cheminement basé sur la lucidité, enjeu capital. La lucidité de tout ce que la nature nous apporte comme bienfait, tout ce que notre société nous assure comme protection sociale, sécurité, éducation, équipements collectifs, soutien, ..., toutes les aides et cadeaux que l'on reçoit de notre entourage, tous les bienfaits que nous accordent la nature ... dont nous faisons partie intégrante.
La lucidité de penser avant de se lever le matin à tout ce dont on dépend et que l'on peut remercier : le plafond et un toit qui nous abrite, allumer la lumière qui jaillit instantanément du bout d'un doigt (voire d'un claquement de doigt ou d'un mot prononcé), l'eau potable et chaude pour prendre sa douche, le pain fabriqué par le boulanger à partir de farine issue de la culture du blé par des agriculteurs, la voiture construite avec des composantes de toutes sortes, le carburant dans la voiture, le téléphone mobile, le réseau qui permet d'utiliser le téléphone, ... 
Alors dites-moi, est-il concevable qu'un humain puisse dire de la manière la plus affirmative qu'il n'a besoin de personne ? Même Robinson Crusoé, symbole de l'autonomie et de l'autosuffisance, remercie la nature.

Une lucidité sur une vérité qu'il faut écrire en grand et qui change tout l'Interdépendance.

Une lucidité qui conduit naturellement à trois attitudes qui font du bien individuellement et collectivement, avec un effet de rayonnement autour de soi :
  • l'humilité qui nous permet de nous remettre à notre juste place, y compris par rapport à l'histoire de l'humanité et par rapport au reste du vivant ; une humilité qui nous permet aussi de ne pas nous mettre en surchauffe quand il s'agit de vouloir œuvrer pour le commun. Cette place, il ne s'agit pas de la faire disparaître, ni dans les motivations à l'action, ni dans l'attribution des réussites de l'action. J'en profite pour distinguer l'humilité de la modestie : l'humilité repose sur la lucidité et donc une juste conscience de soi et de sa part. La modestie tend à minimiser sa part, artificiellement ou non.
  • l'appréciation de tous les bienfaits que nous recevons tout au long de la journée ;
  • la gratitude qui dépend directement de la précédente selon le schéma suivant décrivant un processus d'une gratitude qui naît de l'attention :

Un cheminement qui nous conduit à prendre nos décisions et conduire nos actions dans une approche gagnant-gagnant : pour soi, en prenant en compte les autres parties prenantes (y compris les autres qu'humains), si possible en les associant. 
Il ne s'agit pas de réduire à néant ni le "je fais pour moi", ni le "c'est grâce à moi". "Je fais pour moi" porte aussi le sens "je veux y prendre du plaisir", et du moment que le plaisir immédiat ne fait pas prendre de risque chronique à moyen et long terme, il serait contre-productif d'adopter une forme d'ascétisme quand on sait que les émotions positives sont facteurs d'élargissement des capacités cognitives, stimulantes et rayonnent la bonne humeur.
Dans son livre Plaidoyer pour l'altruisme, Matthieu Ricard évoque à propos de l'altruisme une idée pas si commune et éloignée de ce que j'ai pu apprendre au catéchisme : un acte altruiste peut aussi porter des motivations d'intérêt personnel, du moment que ces motivations ne sont pas premières.

Le "c'est grâce à moi" ne mérite pas de disparaître sous condition qu'il ne ne porte pas le sens "c'est SEULEMENT grâce à MOI". Au contraire, quand il trouve une place à côté d'autres, c'est un facteur de l'estime de soi, de la conscience des progrès, des réussites, de l'interdépendance et des bienfaits de la coopération.

Ma modélisation de 4 dimensions de la Bienveillance met en évidence différents sujets de bienveillance, dans une approche écosystémique. 

Un cheminement qui nous faire prendre conscience de ce qui nous a permis de réussir les actions, de donner la juste place à notre part, à la part des autres, à la part du "Nous". J'attire l'attention qu'il ne s'agit pas de noyer le "Moi" dans le "Nous", de passer d'un extrême (individualisme forcené) à l'autre (transcendance avec l'oubli de soi). Une prise de conscience qui conduit donc à la gratitude.

Un cheminement, dans l'humilité et la détermination, pour lequel j'invite à se donner du temps pour la bienveillance. Et par cette culture de la bienveillance, ma conviction est qu'elle nous redonnera du temps pour ce qui nous est précieux.


Se donner du temps pour cheminer d'une posture basée sur la cupidité vers une posture basée sur l'humanité (cf article Vers une Société de la Bienveillance avec HUMANITÉ) :





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